Nouveau Roman
Christophe Honoré
2012

CDDB-Théâtre de Lorient – CDN

Le geste d’écriture est l’un des moins spectaculaires qui soient. La figure de l’écrivain, en ce qu’elle est caractérisée par ce geste, met donc en question la possibilité même de sa représentation, qu’elle soit cinématographique ou théâtrale. Mettre en scène, filmer un écrivain en train d’écrire, n’a pas de sens. Et quant à restituer, sur scène, le sens de ce qu’il a écrit, d’autres potentialités existent que de simplement demander aux comédiens de s’en faire les porte-voix. Nouveau Roman est une pièce d’écrivains qui, jusqu’à un stade avancé de son processus de création, ne s’est pas appuyée sur un texte. Elle s’est écrite directement sur le plateau, à partir d’improvisations. Nouveau Roman est avant tout une pièce de comédiens aux prises avec des figures d’auteurs ou d’éditeur. Figures – Nathalie Sarraute, Marguerite Duras, Alain et Catherine Robbe-Grillet, Robert Pinget, Claude Simon, Claude Ollier, Claude Mauriac, Jérôme Lindon et Françoise Sagan – qu’il ne s’agit pas de reproduire mimétiquement, mais de s’approprier. L’essentiel du travail d’acteur a consisté à retraiter ce vaste corpus documentaire, à la fois contextuel, littéraire et critique, qui a servi de matière première au spectacle.

Le geste d’écriture est l’un des moins spectaculaires qui soient. La figure de l’écrivain, en ce qu’elle est caractérisée par ce geste, met donc en question la possibilité même de sa représentation, qu’elle soit cinématographique ou théâtrale. Mettre en scène, filmer un écrivain en train d’écrire, n’a pas de sens. Et quant à restituer, sur scène, le sens de ce qu’il a écrit, d’autres potentialités existent que de simplement demander aux comédiens de s’en faire les porte-voix. Nouveau Roman est une pièce d’écrivains qui, jusqu’à un stade avancé de son processus de création, ne s’est pas appuyée sur un texte. Elle s’est écrite directement sur le plateau, à partir d’improvisations. Nouveau Roman est avant tout une pièce de comédiens aux prises avec des figures d’auteurs ou d’éditeur. Figures – Nathalie Sarraute, Marguerite Duras, Alain et Catherine Robbe-Grillet, Robert Pinget, Claude Simon, Claude Ollier, Claude Mauriac, Jérôme Lindon et Françoise Sagan – qu’il ne s’agit pas de reproduire mimétiquement, mais de s’approprier. L’essentiel du travail d’acteur a consisté à retraiter ce vaste corpus documentaire, à la fois contextuel, littéraire et critique, qui a servi de matière première au spectacle.

Générique

Lettre aux acteurs

À l’image de la Nouvelle Vague au cinéma, j’ai l’impression que le Nouveau Roman est devenu vénérable, mais qu’au fond, le milieu littéraire parisien les a au mieux éloignés de leur préoccupation, et plus vraisemblablement bannis. Qu’à l’image de la Nouvelle Vague, nombreux et majoritaires sont « les gens du métier » qui restent persuadés que le Nouveau Roman a pourri la fiction française, l’a contrainte, étranglée, tuée et qu’il était grand temps que nos écrivains se remettent à écrire des vrais bons gros romans, avec intrigue, sujet et personnages, tels que la littérature américaine n’a jamais cessé d’en produire.

Il y a donc quelque chose qui résiste, transgresse, qui continue de fâcher dans cette entreprise du Nouveau Roman, quelque chose qui fait que ce mouvement demeure, plus de 50 ans après sa naissance, une avant-garde. Cette force, il me semble, on peut la nommer, il s’agit du réalisme, réenvisagé par les nouveaux romanciers. Le Nouveau Roman, c’est avant tout un groupe d’écrivains dont chacun refuse d’exprimer ou de représenter quelque chose qui existerait déjà (les formes convenues du réel), mais qui cherche au contraire à produire quelque chose qui n’existe pas encore.

 

Extrait

Alain Robbe-Grillet
Ah Michel ! Non non, ne t’en veux pas d’être en retard ! On a fait un blason et nous en sommes à la devise du Nouveau Roman : « Les castors, faisons barrage ! »

Michel Butor
Mais en quoi ça nous concerne ?

Alain Robbe-Grillet
Parce qu’on est une équipe. Donc on fait un blason, qui serait comme une photographie de notre équipe…

Michel Butor
Oui, enfin, on ne travaille pas en équipe… On travaille chacun de notre côté. On n’a jamais signé de livre ensemble, si ?

Alain Robbe-Grillet
Mais qui te paye ?

Michel Butor
Quel rapport ?

Alain Robbe-Grillet
Jérôme est quand même ton patron. C’est pas lui qui t’incite à écrire, mais c’est lui qui te paye, quand même. T’es bien content que ce soit lui qui te donne tes chèques, quand même, non ? Tu les refuses ?

Michel Butor
Pour mon travail ! Et nous ne le faisons pas ensemble, notre travail…

Alain Robbe-Grillet
Alors je mets « nous ne faisons pas ensemble notre travail » ?

Michel Butor
Déjà, la problématique, moi, me semble fausse…

Marguerite Duras
Je suis un peu d’accord avec Butor…

Michel Butor
Enfin, je veux dire, c’est un exercice… Un pur exercice. Mais je ne me sens pas concerné.

Alain Robbe-Grillet
Par le travail en équipe ? Ou par l’exercice ?

Michel Butor
Je ne travaille pas en équipe.

Alain Robbe-Grillet
Bon alors je vais écrire sur le tableau, par exemple, « Butor ne travaille pas en équipe » ?… Ou juste : « Butor ». Comme ça, nous, on se repère en fonction de ça… Je le mets dans les points négatifs du coup, tu es d’accord… ?

Nathalie Sarraute
Je dois bien avouer que le groupe n’influe en rien sur mon écriture elle-même.

Marguerite Duras
… Se trouver dans un trou, dans une solitude totale et découvrir que seule l’écriture vous sauvera.

Partenaires

Production
CDDB-Théâtre de Lorient CDN

Coproduction
La Colline – théâtre national, Festival d’Avignon, Théâtre national de Toulouse-Midi Pyrénées, Théâtre Liberté-Toulon, Théâtre de Nîmes, Maison des arts de Créteil, Théâtre de l’Archipel-Perpignan, Comédie de Saint-Étienne, CENTQUATRE établissement artistique de la Ville de Paris

Avec le soutien
de Yohji Yamamoto, Y’s et Limi Feu, du Jeune Théâtre National, de la Chartreuse-Centre national des écritures du spectacle et de l’Adami.

Le décor est construit dans les ateliers de la Comédie de Saint-Etienne.

Avec la participation amicale de François Bégaudeau, Geneviève Brisac, Dennis Cooper, Charles Dantzig, Marie Darrieussecq, Alain Fleischer, Isabelle Huppert, Gilles Leroy, Mathieu Lindon, Emilio Lopez-Menchero, Eric Reinhardt, Lydie Salvayre, Philippe Sollers

Remerciements à Mireille Calle-Grüber, Maxime Dambrin, Frédérick Faraut, Marion Lalanne, Irène Lindon, Martin Mégevand, Jean Mascolo, Jacques Pinget, Catherine Robbe-Grillet , les ayants droit de Nathalie Sarraute, la Bibliothèque Nationale de France, la Bibliothèque Jean Vilar, l’IMEC, la Bibliothèque Littéraire Jacques Doucet, le Service cinématographique des armées – ECPAD, les éditions de Minuit, les éditions Benoît Jacob Vidéo, DD Productions, aux lycées d’Arsonval à Saint -Maur, Auguste Blanqui à Saint-Ouen, Saint-Joseph à Avignon, Dupuy-de-Lôme à Lorient et Jean Macé à Lanester ainsi qu’aux élèves interrogés, l’Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse et les étudiants de master 2 en ingénierie culturelle, Éric Vigner, Robert Cantarella, Johan Faerber, Emmanuel Ethis, la Ville de Rostrenen, le Collège Edouard Herriot à Rostrenen et l’Institut suédois à Paris

 

Presse

« Sur l’immense scène, ces comédiens-là, joyeux et fous, parviennent sans jamais essayer de leur ressembler physiquement à incarner ces hommes et ces femmes de langue-là, taraudés par le désir d’une forme d’écriture neuve, refusant d’exprimer ce qui existerait déjà, cherchant à explorer ce qui n’est pas encore représenté, fuyant le vieux réalisme des grands auteurs du défunt XIXe : « Ce que j’appelle réalisme, c’est toujours du réel qui n’est pas encore pris dans des formes convenues », décrète Nathalie Sarraute (Ludivine Sagnier, sexy en diable). »
— Télérama, Fabienne Pascaud, le 10 juillet 2012

« C’est tout l’intérêt de ce Nouveau Roman : il divise, comme le mouvement a divisé en son temps et divise aujourd’hui encore. Quand on aime, on prend tout, et l’on se régale du jeu des acteurs (…), enlevé et, sur le fond, un peu nostalgique d’un temps où des écrivains ont eu la force, même âpre, de décider de s’unir, au lieu de rester chacun dans son coin. »
— Le Monde, Brigitte Salino, 13 juillet 2012

« Il y a à la fois une forme de joie et d’ingénuité dans ce spectacle qui présente en quelque sorte l’instantané d’une époque sans tomber dans le piège de la reconstitution, mais au contraire en la réinventant sur un mode ludique avec un zeste d’humour. »
— Les Inrockuptibles, Hugues Le Tanneur, 16 juillet 2012